La route de Brume en 1900 à partir de Trois Ponts
LES ORIGINES…
En 1769, les « Brum’tais » déclarent que leur église paroissiale de Wanne est trop éloignée de leur village : deux lieues environ séparant, en effet, Brume de Wanne.Cette ancienne agglomération semble avoir eu son église fondée par le Monastère de Stavelot dès l’époque carolingienne. Au 12ème siècle, elle possède une filiale, l’église de Saint Jacques, à Fosse, située à vol d’oiseau à une lieue de l’église-mère. Ajoutons que Brume est à une heure de marche de l’église de Saint Jacques. Celle-ci ne devint paroisse qu’en 1803 et eu pour dépendance au 19ème siècle, la chapelle de Brume et celle de Trois-Ponts, fondée en 1892. Cependant, en 1803, la chapellenie de Brume fut rattachée provisoirement à la paroisse de Bodeux ; mais alors qu’elle dépendait de Fosse depuis longtemps, le chapelain J. Lecomte, fut chargé de desservir aussi la nouvelle chapelle de Trois-Ponts.
En résumé, après avoir été successivement une dépendance de Wanne, de Bodeux et de Fosse, Brume fut détaché de St Jacques pour être annexé à la paroisse de Trois-Ponts, érigée par arrêté-royal du 1er avril 1898. Le même arrêté royal en mentionne un autre, du 26 novembre 1861, par lequel l’oratoire de Brume était érigé en chapelle ressortissant à l’église de Fosse ; et ceci explique pourquoi on ne trouve pas trace de desservant de Brume entre l’époque de la Révolution française et l’année 1862.
La pittoresque chapelle du hameau, jadis ombragée par un gros tilleul, aurait été érigée en 1767. Il semble que cette date soit sujette à caution, comme en témoigne la « Convention et obligation par les manants de Brume, de touchant la chapelle à construire au dit Brume, 5 janvier 1769.
Quant au nom du village, il apparaît pour la première fois, à notre connaissance, dans une charte de Gilles de Fauconpierre, le 1 avril 1287 : un des témoins cités dans cet acte est « Henris de Brume ».
D’après Charles BAIRIN, dans JOURNAL DES ARDENNES du 15.10.1944.
BRUME ET SON PATRON.
La chapelle de Brume est dédiée à Saint Hilaire et aux Saints Anges Gardiens. Qui donc était Saint Hilaire ?
Quoique beaucoup plus ancienne que Saint Remacle, la vie de Saint Hilaire de Poitiers est beaucoup mieux connue. Il est vrai qu’un Evêque et écrivain en période d’hérésie laisse plus de souvenirs qu’un moine !
Hilaire est né à Poitiers vers 315, d’une famille païenne ; il devint professeur d’éloquence. Converti, il fut baptisé à l’âge d’environ trente ans ; il était marié et avait une fille nommée Abra. Dieu attendait son jour pour utiliser cet homme intelligent et énergique. Vers 353, Hilaire fut choisi comme évêque de Poitiers, alors qu’on était en plein dans la crise provoquée par l’hérésie arienne qui niait la divinité de Jésus-Christ. La fermeté du nouvel Evêque lui valut d’être exilé par l’empereur ; cela lui fit un séjour de 4 ans en Orient (en Phrygie, soit en Turquie) qui lui permit d’approfondir sa science théologique. Rentré en Gaule, il travailla à développer la vie monastique et fut le promoteur de plusieurs conciles régionaux. Mais ce pasteur était aussi un homme d’étude ; son œuvre principale est un gros livre sur la Sainte Trinité, où la rigueur de raisonnement ne cache pas une conviction enthousiaste. Il écrivit plusieurs autres livres, dont il ne reste que des fragments. Il mourut un 13 janvier, en 367 ou 368. Il fut proclamé Docteur de l’Eglise en 1851.
La chapellerie de Brume a donc pour patron un Saint qui fut une vraie figure : connaisseur des livres et converti, père e famille et Evêque, homme d’étude et d’action ! C’est un homme qui mit de l’ordre dans son temps.
En Bretagne, on l’appelle Saint Hélier. Le mot Hilaire veut dire joyeux : c’est tout un programme…
La chapelle de Brume possède une statue de Saint Hilaire. Il est représenté en costume d’Evêque, avec mitre et chape, tenant en main un gros livre noir. C’est de l’art populaire, mais il exprime la dévotion de nos ancêtres pour le patron de leur chapelle.
Saint Hilaire priez pour nous.
Marie – Thérèse Nicolay – Massoz
BRUME ET Eugène Gens.
Nous étions arrivés à Brume. Ce petit hameau situé sur un des versants de la haute montagne qui domine le Coo, est un vrai décor de pastorale. Ses maisons éparpillées au hasard, et toutes à des niveaux différents, éveillent l’idée de ce bonheur calme, de ce contentement exempt d’inquiétude et d’ambition, que de tout temps les poètes ont attribués à la vie champêtre et qui n’existe, en réalité nulle part sur terre. Chacune à son courtil, entouré d’un mur de pierres sèches, où fleurissent, au milieu des légumes, des capucines, des pois de senteur, des lupins et des tournesols. Nous vîmes même sur une fenêtre, luxe rare! un fuschia cultivé dans un tesson de pot de lait . Tout autour, des vergers plantés de pommiers et de cerisiers. Dans le village de grands arbres ombrageant des sources, dont les eaux sont recueillies dans de vieux troncs de chêne, creusés comme des pirogues et servant d’abreuvoirs au troupeaux. Au milieu l’église. Et quelle église! On ne saurait imaginé rien de plus simple, de plus pauvre et de plus délabré. Mais la mousse a recouvert ses murs humides; de beaux vieux arbres l’abritent contre la fureur des vents. Le petit campanile qui la surmonte va se perdre entre leurs branches. Elle est fermée mais on voit tout l’intérieur par les trous de la porte. La pluie qui commençait à tomber nous força a chercher un abri sous un de ces auvents dont presque toutes les maisons ardennaises sont pourvues. Une petite fille d’une douzaine d’années vint sur la porte et nous pria gracieusement d’entrer. Nous la suivîmes. La maison, assez grande, paraissait absolument vide et inhabitée. Il ne s’y trouvait d’autre meuble qu’un bahut de chêne sur lequel l’enfant nous engagea a nous asseoir . Puis elle sorti. Un instant après, elle reparu, portant dans chaque main une jatte de lait qu’elle nous offrit de fort bonne grâce . Nous acceptâmes sans façon et bûmes avec plaisir : nous avions chaud, nous avions soif, la maison était propre et le lait délicieux. En repassant devant l’église nous trouvons la porte ouverte et nous entrons. Trois pas suffisent pour en faire le tour et un coup-d’oeil pour en faire l’inventaire . Un petit paysan se mit à tirer une corde crasseuse qui pendait derrière la porte . Une cloche tinta: c’était l’angélus. Des paysans qui revenaient de leur ouvrage s’arrêtèrent et se découvrirent en faisant le signe de la croix. Des femmes vinrent s’agenouiller sur le seuil en murmurant l’Avé Maria